Qui ne se souvient du formidable succès de nos retrouvailles 1985, 1987 et de
celles toutes récentes de 2005 et 2006 au CEM BOUGARA, rencontres animés par les
anciens élèves du CEG de Birkhadem en présence de Mr BOUZAHER, notre Directeur
et de nos anciens profs? En écoutant chacun deux, en écoutant aussi les
témoignages de nos camarades de classes, nous avions alors vécu des moments
intenses d’émotion partagée. Dans ces moments-là, il n’y a plus de différence.
Dans ces moments-là, nous nous sentons heureux de vivre ensemble.
Il y a beaucoup de choses qui se passent dans la vie des gens, mais il y en a
certaines qu'on n'oublie pas.
Personnellement, les moments passés avec KADI Salah et KOUCHI Sid Ahmed et
certains autres camarades de classe, filles ou garçons, je ne les oublierai
jamais. Ces moments de joie, jusqu'aux fous rires, ponctuaient souvent notre
quotidien.
Nos sujets de conversations ?
MAGARBI n° 2, une camarade de classe,
parce qu’elle mettait toujours sa main devant la bouche pour parler (notre prof
de langue arabe faisait la même chose); MEGHERBI, Allah irahmou, qui nous
appelait MICAROBES
(microbes) ; la guéguerre entre Djamel et Mlle ROLAND, Mr BELBLIDIA avec ses
jeux de mots : MOKHTARI:
Ikhtari essoukout, MOUFFOK : lastou mowafaqen, MUFTI la toufti âaleyna.
Quand Mr AIT OUALI ne venait pas, les deux heures de mathématiques du matin se
transformaient en deux heures de football dans les champs de chez Juan (Djenane
Jio). On arrivait en classe en suant, toujours en retard, nos chaussures pleines
de boue et, Mlle ROLAND nous recevait avec « Et voilà les sauvages de la pampa
! », ou bien « C’est vous,
tonneaux creux, les futurs cadres de l’Algérie ? », «
Pauvre Algérie ! », «
Que va devenir l’Algérie de demain ? ». Brave Mlle ROLAND, vous qui n’oubliiez
jamais de nous arranger les cheveux avec votre propre peigne après chaque match
de foot, vous nous manquez beaucoup. Je vous entends encore dire à Hattou : «
Hattou, ne crois pas que je
ne comprends pas le kabyle ».
Mlle ROLAND, où que vous soyez, j’aimerais vous dire que votre nom est gravé à
jamais dans mon esprit, que j’ai bien lu et relu tous les livres que vous m’avez
conseillés : Le Grand Meaulnes d’Alain
Fournier, Le grain magique de Margueritte
Taos et aussi Le livre de mon ami
d’Anatole France.
Mon ami Hamid, lui aussi ancien élève du CEM BOUGARA, mais plus jeune que nous,
m’a rappelé dernièrement un passage de ce livre :
« … Je vais vous dire ce que je vois quand je
traverse le (jardin du) Luxembourg dans les premiers jours d’octobre, alors
qu’il est un peu triste et plus beau que jamais; car c’est le temps où les
feuilles tombent une à une sur les blanches épaules des statues. Ce que je vois
alors dans ce jardin, c’est un petit bonhomme qui, les mains dans les poches et
sa gibecière au dos, s’en va au collège en sautillant comme un moineau. Ma
pensée seule le voit ; car ce petit bonhomme est une ombre ; c’est l’ombre du
moi que j’étais, il y a vingt-cinq ans. Vraiment, il m’intéresse, ce petit :
quand il existait, je ne me souciais guère de lui; mais, maintenant qu’il n’est
plus, je l’aime bien. Il valait mieux, en somme, que les autres moi que j’ai eu
après avoir perdu celui-là. Il était bien étourdi ; mais il n’était pas méchant,
et je dois lui rendre cette justice ; c’est un innocent que j’ai perdu: il est
bien naturel que je le regrette, il est bien naturel que je le voie en pensée et
que mon esprit s’amuse à ranimer son souvenir. Il y a vingt-cinq ans, à pareille
époque, il traversait, avant huit heures, ce beau jardin pour aller en classe…»
Hamza OULD-MOHAND
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